Paris 1889 – Des trains spéciaux au départ de Challans pour se rendre à l’Exposition universelle

Vers la fin du 19e siècle, les expositions universelles se multiplient : Londres, Vienne, Philadelphie… Après 1878, celle de 1889 à Paris « allait être un triomphe, » dû en premier lieu à la construction de la tour Eiffel, et parce que « les progrès techniques ont été tels entre 1878 et 1889 que le public est ahuri… » (Encyclopædia Universalis).

Départ et retour en gare de Challans !

L’exposition se déroule de mai à octobre 1889, et l’Administration des Chemins de fer de l’État propose alors, un peu partout en France, des trains spéciaux « Exposition universelle » et « des billets aller et retour avec une réduction moyenne de 70 %. » Ainsi, le Petit journal (Angers) du 30 mai, annonce que le vendredi 7 juin plusieurs trains partiront entre autres de Challans (apparemment en desservant toutes les localités de la ligne jusqu’à Nantes) avec pour destination Paris-Montparnasse. Retour à partir du 11 juin. On ignore combien de personnes ont profité de cette aubaine…

Exposition universelle de 1889, « Au pied de la tour Eiffel » (Neurdein frères photographes – d’après un document Gallica BnF)

Pour l’instant, nous n’avons pas de photos de cette épopée locale, mais puisque les riches Challandais(e)s – et d’autres des communes voisines – suivaient comme tout le monde la mode de Paris, on peut les imaginer vêtu(e)s de cette façon (ci-dessus et ci-dessous) : jaquette, chapeau claque ou melon, robe à crinoline… en tout cas, voilà précisément le genre de public qu’ils ont rencontré durant leur visite !

« Le chemin de fer Decauville, » service intérieur de l’exposition (ND photo – d’après un document Gallica BnF)

Sur place, ils eurent le choix entre les expositions d’horticulture, de peinture ou de sculpture, mais aussi des Postes et Télégraphes, des Travaux Publics… ou « du Ministère de la Guerre… »

« Le Canon de Bange » (Neurdein frères photographes – ND photo – d’après un document Gallica BnF)

Sans oublier, aussi impressionnante que la tour Eiffel, « la galerie des machines » avec « deux ponts roulants, mus par l’électricité, transportant les visiteurs d’un bout de la salle à l’autre… » (guide Armand Colin & Cie 1889). Une galerie qui fut « stupidement détruite en 1910… » (Encyclopædia Universalis).

« La Galerie des Machines » (Neurdein frères photographes – d’après un document Gallica BnF)
« La Grande Galerie des Industries diverses » (ND photo – d’après un document Gallica BnF)

Mais on doit se souvenir que cet événement était également colonial, avec « les expositions algérienne et tunisienne qui donnent une idée de l’Afrique française… » ou le « village indigène, » sinistre et sordide « zoo humain » à l’entrée duquel, cependant, « on faisait la queue pendant des heures… »

(d’après une carte postale geneanet.org)

Evidemment, le clou de cette exposition fut… « la tour Eiffel… pyramide en fer, en quatre arêtes courbes, entretoisées, reliées entre elles et ayant à leur base un écartement de 129 mètres 52 centimètres. La masse de fer employée pèse plus de 7 millions de kilogrammes (…) Cette tour, qui atteint 300 mètres à son sommet, est la plus haute construction que l’homme ait élevée… » (guide Armand Colin).

(Les fondations de la tour Eiffel – d’après une carte postale geneanet.org)

Une tour « élevée » avec des moyens purement humains, quasiment, en utilisant, pour les fondations par exemple, des pelles et des pioches, des charrettes tirées par des chevaux… 48 000 m3 de terre déplacés à la main !

(Les fondations de la tour Eiffel – geneanet.org)
(geneanet.org)

Mais cette prouesse… cette vitrine pour l’industrie… fut un projet vivement critiqué par 47 artistes qui, en 1887, signèrent une « protestation, » un « vigoureux réquisitoire contre la construction de la tour Eiffel. » Parmi eux : Guy de Maupassant, Alexandre Dumas fils, Charles Gounod, Leconte de Lisle, ou encore l’architecte Charles Garnier… Ils souhaitaient « protester de toutes (leurs) forces, de toute (leur) indignation, au nom du goût français méconnu, au nom de l’art et de l’histoire français menacés, contre l’érection, en plein cœur de notre capitale, de l’inutile et monstrueuse tour Eiffel ! » Mais qui imaginerait aujourd’hui Paris sans ce monument, qui en est devenu le symbole… ?

Et puis, la tour Eiffel n’était pas « inutile… » Toujours selon le guide Armand Colin : « elle procure aux visiteurs le plaisir d’embrasser un horizon d’une immense étendue ; mais elle aura en outre des usages scientifiques (observations météorologiques et astronomiques, expériences de physique). » Et… « En temps de guerre, elle servira à observer l’ennemi et à communiquer à grande distance au moyen de signaux électriques… »

Sources : Encyclopædia Universalis volume 18 thesaurus (édition de 1979 – archives LNC) ; société d’histoire de Challans ; RetroNews ; Gallica BnF ; geneanet.org ; documents et recherches LNC.


© Les Nouvelles de Challans, 8 avril 2024 – Didier LE BORNEC

Impression ou PDF de l'article (vérifiez le format pour les photos)