Janvier 1913, la foudre détruit l’église de Saint-Christophe-du-Ligneron

Voilà quelques temps, des orages nous ont surpris par leur violence. Devant les rues de Challans brusquement inondées, on a entendu dire : « Je n’ai jamais connu ça ! » Même de mémoire de vieux Challandais... c’est parce qu’ils sont trop jeunes

Le 11 mai 1911, le journal l’Espérance du Peuple écrivait : « Un violent orage a éclaté sur Challans à midi et demi mardi. En un instant, les rues ont été couvertes d’eau (…) les caniveaux se sont subitement transformés en torrents. » Et en décembre de la même année, ce fut « une tempête, un ouragan, » qui fondit sur la région et causa de nombreux dégâts notamment à l’église de Challans. Ce n’était presque rien comparé à ce qui se passa à Saint-Christophe-du-Ligneron au début de l’année 1913…

L'église de Saint-Christophe-du-Ligneron avant 1913
L’église de Saint-Christophe-du-Ligneron avant 1913

Dans sa Chronique paroissiale de Challans, le jeudi 16 janvier 1913, l’abbé Charles Grelier note, comme une rengaine : « À midi, un orage épouvantable a éclaté sur la région. La pluie et la grêle sont tombés en très-grande abondance, au point que plusieurs rues ont été couvertes d’eau. » Et un peu plus loin : « la foudre est tombée sur l’église de Saint-Christophe-du-Ligneron et y a causé de graves dégâts. » L’abbé poursuit au conditionnel : « La toiture serait, paraît-il, tombée, et les murs lézardés. Le clocher n’aurait pas eu à souffrir de cette tempête. »

En fait, une grande partie de l’édifice s’est effondrée. Ce ne sera pas pour surprendre l’abbé Grelier ; comme souvent très critique, il avait ajouté : « Cette église, faite sous Louis-Philippe, grâce à la générosité de la bonne Dame de Mauclerc (1), n’avait pas été construite dans des conditions avantageuses. Les fondations étaient solides, mais les murs ne valaient rien. »

La nouvelle église, inaugurée en 1934  (photo LNC 2025)

Est-ce que des murs plus solides auraient résisté ? On peut lire dans l’Étoile de la Vendée du 19 janvier : « La foudre est tombée à deux reprises sur notre église en y pénétrant de deux côtés différents. Les deux courants se sont rencontrés et, chose qu’on voit, paraît-il, très rarement, ont produit une formidable explosion qui a fait l’effet d’une véritable mine… »

(1) Marie-Aimée de Mauclerc, châtelaine du Verger – règne de Louis Philippe : de 1830 à 1848.

Des cartes postales de l’époque donnent une idée des dégâts impressionnants causés sur cet édifice pourtant très, ou trop, imposant, comme le montre plus haut la photo « avant 1913. »

Eglise de Saint-Cristophe après l'orage

Quelques jours plus tard, le 22 janvier, le quotidien conservateur Le Journal du Cher fournit un double éclairage sur l’événement  : sur les faits, et sur l’ambiance politique de l’époque…

Une Eglise détruite par la Foudre

Au cours d’un violent orage, accompagné d’un cyclone, la foudre est tombée sur l’église de Saint-Christophe du Ligneron (Vendée). Le côté de l’Evangile s’est écroulé jusqu’aux fondations, entraînant toute la voûte. Le côté droit est resté debout, ainsi que le clocher, mais celui-ci est profondément lézardé.
Tout le mobilier de l’église a été broyé sauf le tabernacle du maître-autel.
Des pierres énormes ont été projetées à 300 mètres. La catastrophe s’étant produite vers midi, il n’y a eu aucun accident de personne, car l’église était déserte. Une heure auparavant, on y célébrait un service funèbre, et l’assistance comptait plusieurs centaines de personnes.
Quel épouvantable malheur si l’orage avait éclaté pendant la cérémonie !
L’église de Saint-Christophe du Ligneron, bâtie vers 1810, et restaurée depuis, était très remarquable par son style et ses peintures. Il faudra la reconstruire en entier. L’édifice était assuré pour la somme de 900.000 fr.
La population de cette commune, dont le maire est M. de la Plante, gendre de M. de Baudry d’Asson, député, est consternée du malheur qui vient de l’éprouver. Elle aura sans doute à cœur de contribuer à l’édification d’une nouvelle église, mais la néfaste loi de séparation (2) la prive de ressources sur lesquelles elle pourrait compter en d’autres temps.
Provisoirement, le service divin sera sans doute célébré dans une grange, en attendant la construction d’une église en bois, puis d’un édifice en pierre.

(2) Loi de séparation des Eglises et de l’Etat de 1905.

La municipalité et son maire, Paul de la Plante, châtelain du Verger, s’empressèrent de faire construire par un charpentier « un local provisoire pour assurer le service du culte en attendant la reconstruction de l’église. »

L’endroit sera longtemps connu sous le nom de « l’église en bois, » car il servira durant dix ans…

Pourtant, l’église étant assurée, les travaux débutèrent rapidement. Mais la guerre de 1914 éclate… et le responsable du chantier perd la vie au front. La construction du nouveau sanctuaire reprend difficilement après guerre. Là, nouveau coup du sort : en décembre 1920, les arcs du transept et les colonnes s’effondrent ! Coup du sort ou… malfaçons. L’architecte est remplacé en 1921. Tout est à recommencer, mais bientôt l’argent manque. En 1922, une loterie est organisée afin de terminer l’église. Et celle-ci étant « achevée pour l’essentiel, » une première messe y sera donnée le 30 août 1923. Mais finalement, l’inauguration n’aura lieu qu’en 1934, avec « un grand nombre d’évêques et de prélats, des centaines de prêtres, une affluence considérable de fidèles, » et, « parmi les autorités civiles, M. de Baudry d’Asson, sénateur de la Vendée… »

De l’ancienne église, il subsiste le bas-relief du frontispice (photo LNC 2025)

Documentation : archives de la Vendée : chronique paroissiale de l’abbé Grelier et l’Étoile de la Vendée ; archives de la Shenov, Philippe Jaunet ; l’Echo de Paris du 1er septembre 1934 ; recherches et documents LNC.


© Les Nouvelles de Challans, 6 février 2022 (mise à jour 6 juillet 2025) – Didier LE BORNEC

Impression ou PDF de l'article (vérifiez le format pour les photos)