La décision a été prise lors de la session du Conseil départemental de ce vendredi 20 octobre 2023 : « Il n’y aura pas de taxe sur le pont de Noirmoutier… »
Ce projet de taxe, ou « écotaxe, » était « souhaité par certains élus de l’île de Noirmoutier, » a rappelé Alain Leboeuf, président du Conseil départemental, lors de cette séance. L’objectif était entre autres de trouver des rentrées d’argent pour « la préservation de l’île. » Mais le dernier mot revenait au Département, à qui route et pont appartiennent. Ce souci de protection de l’île est « une noble cause » pour Alain Leboeuf, il y adhère, mais cela se fera « avec d’autres sources de financement. »
Les arguments du Conseil départemental sont nombreux : « Les Français en ont marre des taxes, » surtout en cette période d’inflation sans fin. Et puis, c’est « un mauvais signe à envoyer » que de toujours lier environnement et taxes. On parle aussi de « freiner la sur-fréquentation touristique, » mais Alain Leboeuf n’entend que cela, et il faudrait mettre des péages sur toute la côte vendéenne. De plus, un pont payant entraînerait certainement une « sur-fréquentation » du Passage du Gois, qui est également à préserver…
Circuler librement en Vendée
Enfin, point le plus important pour Alain Leboeuf : « Je souhaite que nos familles puissent continuer à circuler librement en Vendée. » Une liberté « d’aller et venir partout » voulue avec insistance : cette taxe ne serait « pas en adéquation avec le modèle vendéen où nous souhaitons que nos familles, nos enfants puissent continuer de rejoindre librement notre trésor commun qui est l’Atlantique. » Une décision largement applaudie…
Ce n’est pas la première fois que cette idée d’un nouveau péage resurgit… pour les mêmes raisons. En 1994, un mois à peine après la suppression du péage initial, la presse annonçait : « Le pont de Noirmoutier est gratuit depuis le 1er juillet. Les touristes en profitent. Mais, sur l’île, des responsables réfléchissent, avec des avis différents, à un péage pour les non-Noirmoutrins… » et déjà il s’agissait « de financer la réparation des dégradations imposées à l’environnement. » Voilà presque 30 ans, Jacques Oudin, sénateur et président du district de Noirmoutier, redoutait que « l’afflux de touristes qu’a engendré la gratuité (…) ne se traduise par des altérations plus sévères à l’espace naturel… » Et les « recettes dégagées » auraient pu permettre de « protéger les dunes, les forêts, tous secteurs victimes d’un piétinement intensif. »
Un péage qui rapportait 7 millions de francs par an…
« Des maires, des professionnels, le conseil d’administration de l’office de tourisme… » pensaient qu’il était dommage d’avoir supprimé ce péage. Il faut dire qu’il rapportait, « bon an mal an, 7 millions de francs (…) dont 6 millions prélevés sur les non-autochtones… » Aussi, « sans le dire vraiment, Jacques Oudin verrait plutôt d’un bon œil le retour du péage… » Et il pensait « que le Département, qui est propriétaire de la route reliant l’île au continent, serait plutôt d’accord avec sa proposition. » Le sénateur avançait même que « Philippe de Villiers (alors président du Conseil général) serait favorable à ça. » Ce n’était pas l’avis de Jean-Philippe Gabolde, directeur général adjoint du Département, pour qui cette rumeur était « ridicule, » et d’ailleurs, la loi ne permettait pas « de prélever de telles surtaxes. »
Philippe de Villiers était-il pour ou contre ?
Dans un autre article, on lisait : « Philippe de Villiers ne veut pas qu’on rétablisse le péage au pont de Noirmoutier. Il plaide plutôt pour une taxe au profit de l’environnement… » Mais qui paierait ? Pas « les insulaires, » pour Jacques Oudin, ils avaient « payé leur pont. » Et c’est ce qui était également reproché au projet de taxe 2023, il frappait « à l’aveugle. »
On l’a vu, celui de 1994 n’a pas abouti non plus. « Pour que soient institués taxe ou péage, » on devait auparavant « recueillir l’accord des communes concernées, du Département, » et attendre « une nouvelle loi, » ou « une modification de la loi visant à mieux financer, par des ouvrages à péages locaux, la protection des milieux sensibles… »
En 1994, François Mitterrand était Président de la République, mais il avait perdu les législatives, et nous vivions la « première cohabitation, » avec Edouard Balladur pour Premier ministre…
Sources : Conseil départemental de la Vendée ; archives de la Shenov, fonds Fernand Airiau : articles de Ouest-France signés G.N. et M.M. (vendredi 29 juillet 1994) – G.N. et L.A. (non daté) G.N. est sans doute Gaspard Norrito et M.M. Michèle Mercier ; document et recherches LNC.
© Les Nouvelles de Challans, 21 octobre 2023 – Didier LE BORNEC